mercredi 28 septembre 2011

Mieux que l’obéissance : Faire confiance à son évêque

Chacun remue ce qu’il peut! sur un forum catholique, le pseudo Grèzes entend montrer que la FSSPX serait «en contradiction avec la Tradition de l'Eglise». Il cite en appui une lettre du Cardinal Hoyos, reprochant notamment des «manques de charité» de la part de la FSSPX – Son Éminence cite comme exemple un texte de… l’abbé de Tanoüarn, qui écrivait que «le récent message du cardinal Sodano aux pèlerins de Paris à Chartres insiste deux fois en dix lignes sur l’obéissance aux évêques, sur la nécessaire docilité des catholiques traditionalistes à l’égard de leurs persécuteurs de 30 ans. Pour ceux qui s’imaginaient que Rome ouvrait grand ses bras, c’est un camouflet. Un de plus.»

Ce que ne cite pas Grèzes, c’est l’adresse de cette lettre («Cher Frère dans le Seigneur») ni sa formule finale («je vous reste uni et dévoué») ni sa date: 5 avril 2002 – les propos de l’abbé datant d’il y a plus de 10 ans. Mais peu importe: la question que je me suis posée en relisant ce texte, c’est : Comment des gens intelligents et de bonne volonté, ayant a priori les mêmes bases et le même but, peuvent-ils s’opposer autant alors même que leurs points de vue respectifs sont légitimes? – J’ai réfléchi, et je me suis dit que:

1. Il est perceptible en 2011 que Rome «ouvre grand ses bras», et ce depuis un certain temps. Pour autant, pouvait-on le savoir dès le départ? Permettez-moi une analogie: vous êtes à la campagne, un point apparaît à l’horizon. C’est votre vieil ami mais vous ne le reconnaitrez pas avant qu’il ne s’approche un peu… ou beaucoup. Cela varie d’une personne l’autre, selon la qualité des yeux (et l’état d’esprit) de chacun. Certains le reconnaitront à 600 mètres (bravo!), d’autres à 200, d’autres à 50 mètres. Quand il sera à 10 mètres, la plupart des gens auront reconnu le vieil ami – mais pas tous. Il est pourtant présent dans le paysage depuis le départ, mais vous ne pouviez le reconnaitre avant qu'il se soit approché – à 600, 200, 50 ou 10 mètres.

2. Reste la question des évêques. L’abbé de Tanoüarn ne peut pas (en 2001) constater autre chose qu’une certaine discrépance entre l’attitude de l’épiscopat d’une part, et de l’autre l’idée que Rome «ouvr[irait] grand ses bras» aux traditionalistes. Il en conclut (à tort, puisque dans les conditions de l’époque) qu’il n’y a pas d’ouverture.
Mais le cardinal Hoyos de son côté choisit de fermer l’œil sur le constat («évêques … persécuteurs de 30 ans») – et les propos de l’abbé sont effectivement «pas très respectueux»… une fois privés de leur objet. Sauf à se mettre tout le monde à dos, le cardinal Hoyos pouvait-il faire autrement que d’ignorer la partie sur l’épiscopat?
Qu’on me permette une anecdote personnelle – j’avais écrit à mon évêque, dans les dernières années du 20ème siècle. J’avais pensé malin de formuler ma demande dans les termes les plus neutres, demandant «quelle est la valeur des messes célébrées par les prêtres de la Fraternité Saint Pie X?». La réponse avait été rapide, crayonnée au dos de mon courrier froissé: «Quand on va à St Nicolas du Chardonnet on prend ses responsabilités. Vous êtes excommunié. Salutations». Un peu sceptique j’avais écrit à la Commission Ecclesia Dei pour lui demander de confirmer – ou d’informer? Mgr Perl m’avait répondu (outre la mise en garde contre les dangers de schisme et le rappel du motu proprio de 1988) «Faites confiance à votre évêque ; effectivement vous n’êtes pas excommunié, seuls le sont les évêques de cette communauté». Je cite de mémoire, mais c’était aussi clair et net – je m’étais alors dit qu’à Rome, on était vraiment très fort.

2 commentaires:

  1. Terrible laconisme de cet évêque excommuniant en froissant rageusement une lettre.

    Et de fait, la réponse de Rome est très forte, très jésuite, de dire une chose et son contraire:

    "Faites confiance à votre évêque", "vous n'êtes pas excommunié"!

    Ou comment le principe de non contradiction logique peut se frayer un chemin là-dedans!

    Pour autant, que les évêques aient été des persécuteurs de trente ans des mouvements traditionalistes peut se justifier par le "sport" que semblait être, au sein de ces communautés, de les vilipender, sans le moindre respect pour leur autorité, c'est-à-dire sans pratiquer la Foi en ce quatrième attribut de l'Eglise que nous confessons dans le "credo": l'Eglise apostolique.

    L'apôtre ne devait-il pas se montrer plus magnanime que le fidèle? Assurément. Mais il y a des moments où la nature se révolte, de devoir toujours tendre l'autre joue.

    La réponse du responsable de la commission "eclesia dei" mettait aussi heureusement l'accent sur une autre vertu dont on pouvait espérer la floraison dans le courant traditionaliste:
    la vertu de la confiance opposée à l'attitude de défiance systématique, jusqu'à soupçonner, pour beaucoup de traditionalistes qui se rendent à une messe célébrée selon le nouvel Ordo, que le prêtre a, en la célébrant, des intentions qui la rendent invalide.

    Le diable n'est-il pas celui qui insinue le soupçon, au rebours de la "confiance dans les autres" qui est un fruit de l'esprit? Et de grâce, ne succombons jamais à la tentation de chercher à savoir qui a été le premier insulteur, le premier persécuteur, sinon nous n'arriverons jamais à pardonner.

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