mercredi 11 novembre 2009

Libéralisme : oui ou non ?

Beaucoup de monde ce mardi pour une conférence difficile dont le titre ne fait guère mystère du contenu : Résister au libéralisme.

Je suis chargé de poser quelques questions au conférencier, François Huguenin... qui n'en a pas besoin, tant son aisance éclate et tant son calme emporte la mise... Heureux les doux car ils possèderont la terre. Depuis que je propose chaque dimanche une conférence sur les Béatitudes (dimanche prochain à 18 H : Heureux ceux qui pleurent...), je constate autour de moi leur efficacité pratique. La douceur : il n'y a pas force plus grande, lorsqu'elle est non pas le résultat apprêté d'un équilibre glandulaire, mais l'effet d'une volonté ardente et d'une conquête... de soi ! Il y avait de cela, cher François, dans votre prestation.

Cette douceur vous donnait, pour expliquer des concepts difficiles comme celui du voile d'ignorance sur lequel je vais revenir dans un instant, une autorité étonnante. Une force de conviction ! Beaucoup dans la salle étaient un peu perplexes : pourquoi aller chercher l'antilibéralisme chez les Ricains. D'autres n'étaient simplement pas d'accord avec cette idée de "résister au libéralisme". Certains auraient volontiers résisté autrement qu'à travers le communautarisme et le renouveau théologique américain que François Huguenin nous présentait. le débat fut long et d'un excellent niveau. Mais je crois que chacun a pu trouver son compte dans le fil de la conférence.

Il a fallu d'abord définir le libéralisme. C'est John Rawls qui sert d'étalon ou de parangon. Le libéralisme de Rawls est issu d'une réflexion sur l'individualisme social nécessaire et sur le contractualisme que cela suppose. Chacun contracte avec tous en demeurant dans une ignorance volontaire de sa propre identité personnelle, chacun accepte de mettre de côté ses convictions fondamentales concernant ce qui est vrai et ce qui est bien, pour s'en tenir à une idée du "juste" qui sera purement politique.

Rawls, personnage émouvant par sa rigueur et sa bonne foi, tente de ne pas glisser dans les impasses de la laïcité à la française. Il aimerait trouver le moyen pour que ce consensus neutre ne corresponde pas à une neutralité forcée dans l'ordre axiologique ou religieux. Force est pourtant de constater que son système contractualiste se déploie toujours comme un système englobant, qui ne laisse rien subsister en dehors de lui...

Comment résister au libéralisme de Rawls ? François Huguenin ne s'attarde guère sur les libertariens, ces anarchistes "de droite" qui remettent en cause l'idée même d'un ordre politique, en jouant à chaque fois l'individu contre la société civile et la société civile contre l'Etat.

Il s'en tient à trois courants de pensée, qui ont ses faveurs : le courant néo-républicain, qui exalte la "virtu" (au sens machiavélien du terme) qu'il faut pour servir sa patrie et trouve dans cette "virtu" républicaine une véritable identité spirituelle, compatible avec l'individualisme social dominant ; le courant communautarien, illustré entre autres par John McIntyre, qui, pour retrouver un véritable "bien commun" professe la nécessité de respecter les communautés qui forment la Cité ; enfin les théologiens (en particulier John Cavanaugh, jeune et brillant représentant du courant Radical orthodoxie), qui posent avec courage le problème de la vérité hors duquel, au fond - c'est toute l'erreur libérale de penser le contraire - il ne saurait y avoir de politique respectueuse de l'homme, en particulier dans son rapport avec Dieu.

Sa cartographie intellectuelle des résistances américaines au libéralisme est très claire. Du point de vue de l'histoire des idées, son livre s'impose comme une synthèse magistrale. Il est bien évident, pour revenir à notre vieille Europe, que son regard est comme aimanté par l'œuvre du pape Benoît XVI qui converge étrangement avec ces résistances américaines au libéralisme.

Je suis heureux d'annoncer que j'inviterai François Huguenin vendredi à 18 H sur Radio Courtoisie, pour continuer notre conversation.

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