dimanche 30 août 2009

"Le 13e jour" - un film

L'abbé de Tanoüarn surfant sur des sites internationaux, il est tombé sur the13thday.com qu'il me laisse vous présenter. Le 13e jour de mai 1917, et le 13e jour de chacun des 5 mois qui suivirent, eurent lieu des apparitions à Fatima (Portugal). Trois enfants... Mais non! quand on parle d'un film on ne raconte pas la fin. Encore que je ne doute pas que beaucoup d'entre vous la connaissent, inutile dès lors que je l'écrive.

De cette histoire Ian & Dominic Higgins ont fait un film - The 13th Day - dont le site the13thday.com donne la bande annonce (cliquez sur The Film puis sur Watch the trailer). Dans ce genre d'entreprise, il y a deux dangers: se contenter d'une mise en image qui n'apporte rien de plus que d'être un nouveau media, d'une part. Et vouloir enrichir son sujet, d'autre part. On peut espérer que les Higgins ne tombent ni dans l'un ni dans l'autre. Ils sont graphistes de formation, leur univers esthétique était jusqu'alors celui en vogue pour les jeux de rôle et dans l'uchronie, de là des images très travaillées, belles comme un objet bien fait. Osons le mot, c'est hi-tech sulpicien. A dire vrai c'est sur cette seule bande-annonce qu'il faut se faire une idée, les quelques commentaires sur les blogs et forums anglophones ne se basent pas sur autre chose. Un regret: la jeune Lucia dos Santos (on nous la montre volontaire et énergique) évoque plus une jeune Américaine contemporaine qu'une petite Portugaise du début du siècle. Cela dit, et selon la formule bien connue, le cinéma est aussi une industrie. De là viennent certaines américanisations - la plus factuelle étant que le journal O Seculo rendant compte des évènements titre en anglais.

Pour l'instant, aucune date de sortie n'est prévue pour la France. Les producteurs visent le 13 octobre 2009 pour les États-Unis.

vendredi 28 août 2009

Hier soir au bord de l'eau...

Oui, je sais, je suis un privilégié. J'étais hier soir au bord de l'eau, avec quelques amis, à déguster un pigeon somptueux (élévé à Mesquer), à deviser dans le fracas des vagues, à la Roche Mathieu, non pas de tout et de rien, mais de tout ce qui nous importe, de la belle Tradition catholique, de la raideur de Mgr Tissier dans son dernier "pamphlet", du commentaire de l'Apocalypse de saint Béat (orthographe non garantie), du symbolisme de la mer de saint Jean à Baudelaire etc. Personne n'est d'accord avec personne mais chacun renchérit et la conversation prend forme. Si le bonheur est une réalité et pas seulement un idéal, me disais-je, il doit être dans ces instants fugaces et irreproductible où l'amitié conspire avec la beauté du paysage, "où les parfums les couleurs et les sons se répondent", où la vérité devient sensible, où l'émotion, maîtrisée, produit comme une évidence...

Les mots sont infirmes pour décrire ces moments simples... Mais qu'importe les mots, lorsqu'on sait qu'on touche à l'essentiel, à un bien qui n'est pas utile, qui est gratuit et qui justifie la peine que l'on se donne à vivre. Splendeur de la foi partagée entre amitié et beauté. Tout paraît futile. Rien n'est plus important. Le Ciel est possible puisque la vie est si belle !

Ce n'est sans doute pas là le bonheur au sens d'Aristote qui d'après les résumés scolaires consiste en l'acte ordonné des facultés supérieures. C'est tellement court. Je lis ce texte, ce matin, aux protagonistes de la soirée et l'un d'eux me souffle : ce n'est pas le bonheur, c'est la bonne heure...

Petit conseil d'œnologue improvisé : le vin de Mareuil vaut le détour...

"La Fédération Saint Gélase parce que..."

Le MetaBlog a été contacté par une 'Fédération Saint Gélase'. Nous avons voulu en savoir plus - voici leurs réponses.


Qu'est-ce que la Fédération Saint Gélase - et pourquoi son nom?

La Fédération St Gélase est une association de loi 1901. Pourquoi St Gélase? déjà parce que nous ne voulions pas d'un énième St Martin, St Pierre, St Curé d'Ars, nous voulions un Saint qui sorte un peu de l'ordinaire, et qui soit le reflet de la personnalité de la Fédération. St Gélase possédait une forte personnalité mise au service du Pape, et défendit vigoureusement la primauté de Rome.

De quoi se constitue plus particulièrement la Fédération St Gélase, et qui peut y adhérer?

Permettez-moi de préciser un point important: tous les membres de St Gélase sont des laïcs indépendants. St Gélase est une Fédération autonome et n'existe que pour l'Eglise. Ces laïcs sont engagés dans le développement des messes de la forme extraordinaire. Ils viennent de Paroisses, de Fraternités, et d'Instituts différents, c'est qui fait sa richesse. Son Bureau est constitué d'un Président, d'une Secrétaire, et d'un Trésorier. Est membre de droit, tous les présidents d'associations de loi 1901 ou d'associations de fait qui adhèrent à la Fédération et à son projet. Cette adhésion est gratuite. Ces associations œuvrent à la réception et à la mise en œuvre du Motu Proprio Summorum Pontificum de notre St Père Benoît XVI du 07 juillet 2007.

Quels sont les objectifs généraux que vous voulez atteindre ?

Nous souhaitons atteindre plusieurs objectifs: en premier lieu faire découvrir à tous et à toutes les trésors de la liturgie du rite selon la forme extraordinaire. Aider également les associations de fidèles locaux à le mettre en œuvre, dans le cadre de leur paroisse.

Quel sont vos contacts avec la hiérarchie de l'Eglise?

La Fédération mandatent régulièrement des personnes de confiance qui se rendent à Rome afin de transmettre des dossiers, des messages et aussi d'y recevoir des conseils. Quant aux personnes qui se déplacent, et celles rencontrées, vous comprendrez que je ne peux m'étendre sur le sujet … et se sera là mon seul "joker".

Quel est l'intérêt de regrouper des groupes formés, ou en formation?

La plupart des fondateurs de la Fédération sont des personnes ayant déjà travaillé à la mise en place du rite extraordinaire, dans leur propre paroisse. L'idée de la Fédération est venue naturellement en discutant avec d'autres responsables. Ils nous est paru important, au vu des différents cas, de permettre à ceux qui se lancent dans cette démarche de pouvoir profiter des expériences de chacun et d'aider éventuellement en donnant des conseils pour la mise en œuvre du Motu Proprio.

Bien évidement, le président local ne perd pas sa liberté d'action, la Fédération étant là pour l'épauler et lui apporter son soutien. Par l'intermédiaire de son site Internet www.gelase.org, la Fédération s'est dotée un moyen moderne de communication. C'est une source d'information publique avec un accès privilégié pour ces membres.

La Fédération peut être amenée à prendre des positions publiques concernant l'application du Motu Proprio. Elle offre, à ces associations filles, un espace de communication permettant d'annoncer des horaires de messe, des liens, de présenter les paroisses. Cet espace public est sous la responsabilité du Président local, il peut y mettre l'actualité de ses démarches et ses commentaires. Les présidents d'associations filles ont un accès privilégié au site qui comprend: plusieurs forums de discussion, divers téléchargements de documents, une rubrique feuilles de messe, des petites annonces, un espace pour mutualiser les divers besoins.

Il est déjà difficile de monter un groupe informel. Le faire de manière formelle, n'est-ce pas rencontrer plus de réticences encore?

Non, par l'intermédiaire d'une association locale, les choses sont claires, il n'y a pas de secret, les choses se font au grand jour. Le Curé de la paroisse n'a pas en face de lui une nébuleuse plus ou moins visible. Pour les fidèles, cela permet de centraliser des demandes officielles, de manière efficace, grâce à l'intervention d'un seul interlocuteur. Le fait de le faire de manière formelle, permet d'organiser ensuite plus facilement des activités complémentaires pour que cette communauté vive au tour du rite extraordinaire.

N'y a-t-il pas le risque d'effrayer certains curés qui craindront d'être face à une offensive concertée, plutôt qu'à une initiative locale?

Non, il n'y a pas de risque d'effrayer certains Curés. Un seul interlocuteur facilite vraiment les relations. C'est bien connu, on a toujours peur de ce que l'on ne connaît pas ! Il faut travailler avec le Curé de sa paroisse, dans la charité. Nous faisons partie intégrale de la paroisse, le St Père nous y invite "Nul n'est de trop dans l'Église". Nous ne sommes pas des catholiques à part, mais des catholiques à part entière!

Qu'entendez-vous par intégration ecclésiale?

Nous faisons partie de la paroisse et du diocèse, comme une communauté à part entière. Ce n'est pas un vain mot. Notre différence étant d'avoir une sensibilité pour le rite extraordinaire. L'intégration passe par des droits, notamment le droit d'exister et d'être traité sur le même pied d'égalité que les autres communautés.

Mais il n'y a pas de droits sans devoirs: Les Curés de paroisses sont bien démunis face à la pénurie de prêtres et doivent courir à droite et à gauche sans arrêt. C'est pourquoi, nous demandons à nos membres de s'intégrer dans les diverses équipes afin d'apporter leur aide à la paroisse. Plusieurs moyens sont possibles, pour n'en citer que quelques uns: le ménage dans l'Église, l'entretien d'objets liturgiques et des ornements, l'accueil de fidèles en journée dans les Églises, mise en place de chapelets. Mais cela peut également aller plus loin, comme aider à la mise en place d'un catéchisme de sensibilité traditionnelle avec son Curé ou à la mise en place d'un catéchisme dans le cadre d'un patronage, etc… Il est possible d'avoir une vie de communauté dans sa paroisse, c'est que nous encourageons par divers activités.

En quoi consiste l'adhésion de 1€ et a quoi sert elle?

La cotisation annuelle ne concerne que les associations locales. Le prix de l'adhésion a été fixé par la Fédération, pour que nul ne soit empêché de faire partie d'une association locale. Les dons de fidèles sont les bienvenus. Il est important pour un Président de regrouper les fidèles, afin d'avoir une structure, une vue d'ensemble et des moyens. Cela permet aussi juridiquement d'exister et de financer les besoins: objets de culte, ornements, location de salle, bulletins, etc... Outre les cotisations, l'association doit pouvoir s'auto-financer grâce à une table de presse, vente de missels neufs et d'occasions, ventes de gâteaux, kermesses etc…

Que demandez-vous concrètement aux associations faisant partie de St Gélase?

Plusieurs choses sont demandées aux associations filles:

De s'intégrer dans la paroisse et d'aider par leurs actions au règne de notre Seigneur Jésus-Christ

D’accueillir tous les fidèles attachés à la célébration de la forme extraordinaire sans exception, notamment: les fidèles n’allant plus à la messe depuis le Concile ou postérieurement, les fidèles qui fréquentent la messe ordinaire, les fidèles des communautés attachées à la tradition, et ceux de la Fraternité Saint-Pie X.

D'organiser, si possible, une fois par trimestre une conférence - Pourquoi ne pas commencer cette année par le St Curé d'Ars.

D'aider du mieux possible le Curé a mettre en place l'organisation de la messe, chorale, organiste, livret de chants, service liturgique cérémoniaires, servants, etc... Mettre en place dans la mesure des moyens des formations sur l'histoire de l'Eglise, le latin, les différents conciles, le droit canon, etc... Mettre en place des distributions de tracts dans les boîtes aux lettres ou sur les marchés pour informer la population locale qu'ils peuvent venir découvrir ou redécouvrir ce rite dans le cadre de la paroisse.

Concevoir ou participer à un pèlerinage dans l'année en chapitre. Mettre en place un service social, peut importe le service cela peut allez de collecte de vêtement comme aider des personnes dans le besoin. Et enfin pour finir de faire figurer dans le nom de l'association filles St Gélase - Ste Apolline.

Merci de ces réponses... et bon courage.

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Pour tout contact:
Fédération St Gélase
BP 80033
28190 Courville Sur Eure
France
contact@gelase.org

jeudi 27 août 2009

Ah l'islam !

Bouteille à l'encre... Cher Webmestre, vous dites que les rapports entre les catholiques traditionalistes et les musulmans sont globalement mauvais. Je ne suis pas de votre avis. Je crois qu'un Gaulois catholique est plus proche d'un musulman croyant qu'un Gaulois bobo, athée et incapable d'envisager autre chose (groupe social sur-représenté dans les grandes villes). La foi est toujours une attitude personnelle, même dans une religion aussi impersonnelle, aussi collective que l'islam et ce rapport de personne à personne entre croyants profonds est forcément bon.

Vous dites que 10 % des musulmans observent les pratiques musulmanes. Sachez que dans un numéro de Libération de la semaine dernière, on explique au contraire que 70 % des musulmans de France font le ramadan cette année, c'est à dire s'abstiennent de manger entre le lever et le coucher du soleil.

Interrogé sur ce chiffre important Abdelwahab Meddeb, responsable d'émissions sur l'islam à France Culture répond ainsi à Catherine Coroller, spécialiste de la religion à Libé. Le moins que l’on puisse dire est qu’il ne mâche pas ses mots ; il attaque tout à trac : « Dans un pays comme le Maroc, que je connais bien et qui était jusqu’alors très libéral, on vous emmène en prison si vous «dé-jeûnez». Le jeûne n’appartient plus à l’exercice spirituel, à la discipline au sens fort du terme, ce qui mérite le respect. Le jeûne mystique est vraiment très beau. Dans les Illuminations mecquoises, Ibn Arabi (mystique arabe né en 1165 en Andalousie), en fait une analyse extraordinaire et l’articule de manière profonde avec la pratique du jeûne chez les chrétiens et les juifs. Mais aujourd’hui, le jeûne est essentiellement un phénomène social. Que les gens jeûnent ou pas ne regarde qu’eux. Mais si c’est un jeûne coercitif, violent, et que celui qui jeûne méprise celui qui dé-jeune, voire exerce sur lui une forme de police des mœurs, il faut dire stop. En Égypte, où je me trouve, je constate que le jeûne est quelque chose de construit. Ce qui compte n’est pas que l’individu fasse sa propre expérience du jeûne. Le jeûne sert à restaurer le pacte communautaire ». Il prend l'exemple de l'Egypte et celui du Maroc, mais il est évident qu'il pense aussi aux Banlieues européennes, où la contrainte sociale est très forte et où, hélas, elle se confond avec la contrainte religieuse.

Un peu plus bas, le même Meddeb s’en prend au fonctionnement même de la pratique religieuse en pays musulman, incompatible selon lui avec la liberté des personnes, que notre modernité suppose et que nos sociétés cultivent : « Dans l’islam, il y a un dit du prophète (hâdith) selon lequel si vous ne respectez pas la pratique, faites-le en secret. Cet aspect de la tradition est un peu hypocrite, c’est l’esprit Tartuffe. Or, la modernité, c’est de pouvoir dire «non». Il faut que les gens puissent dire : «C’est ma conviction et je la montre par un acte, celui de jeûner ou non». La liberté de l’individu est le préalable à la liberté politique ».

Citant ce hâdith, Meddeb montre bien la dimension collective de l'islam, qui n'est pas, comme le christianisme, une religion personnaliste. Il y a des mystiques musulmans. Meddeb cite Ibn Arabi. Mais ces mystiques sont persécutés par la Communauté, qui, à travers l'islam règne seul. Islam ? C'est la soumission à la Communauté, qui, dans son unanimité présumée représente Allah lui-même. C'est pourquoi, lorsqu'on observe pas une règle, ce qui compte, dit le hâdith cité par Meddeb, c'est que la communauté ne s'en aperçoive pas. On peut aussi interpréter dans ce sens le principe musulman de la takya, sur lequel mon ami Romain Koller avait commis un remarquable papier dans Objections in illo tempore. Peu importe de mentir sur l'islam (ou de garder le silence sur tel ou tel aspect gênant) si c'est pour le service de la communauté. La recomposition intégriste que l'on observe dans nos banlieues obéit aux principes de cet unanimisme religieux.

Vous souhaitez : Bon ramadan à nos amis musulmans, pour finir. Il me semble que ce souhait, valable de personne à personne dans le personnalisme fondamental qui anime les croyants, ne vaut pas collectivement pour l'islam. Autant ce salut religieux collectif ne me choquerait pas adressé aux juifs, parce que nous sommes de la même matrice ("Bon yom kippour" par exemple, le jour du Pardon est dans la Bible), autant un salut religieux collectif aux musulman est théologiquement plus difficile à admettre, parce que les matrices sont différentes et que la matrice islamique se sent partout vocation à se substituer à la matrice biblique dont vivent ceux que le Coran appelle solidairement et souvent dans le même mépris (voir sourate 9) "les gens du Livre".

Les réflexions de Meddeb citées plus haut (surtout la deuxième) montrent que l'on peut, sans aucun mépris pour les personnes, mettre en question certaines lignes fortes de l'islam, comme on le fait d'ailleurs en Europe depuis trois siècles pour le christianisme.

mercredi 26 août 2009

Intégration!

J’avoue que moi aussi ça me fait drôle de voir de la viande halal dans la supérette d’une petite ville normande. Je préférerais que la France soit toujours une terre de chrétienté mais voilà, même les Gaulois ne font plus guère baptiser leurs enfants. Dans les écoles les élèves s’appelaient Etienne Odette Marc Françoise ou Robert - ils s’appellent maintenant Malika Théo Anaïs Rayan ou Sabrina. La population se modifie, cela crée quelques frictions – ne nous cachons pas derrière notre petit doigt.

Hélas, je crains qu’au lieu de regarder ces choses en face on les fantasme. Concernant la place des Maghrébins en France, je vois deux fantasmes. En gros, le fantasme de gauche: «Les Maghrébins ne peuvent pas s’intégrer à cause des mauvaises conditions qu’on leur fait» et celui de droite, plus fréquent chez les traditionalistes: «Ils ne peuvent pas s’intégrer du fait de leur religion». C’est souvent ce qu’«on» pense dans notre milieu. Et bien je dis, moi, que les Maghrébins s’intègrent, à l’exception de deux petites fractions, celle qui se radicalise et celle qui s’assimile carrément.

Prenons l’exemple de la viande puisque c’est elle qui relance l’affaire. «On» reprochait aux Maghrébins, dans les années 80, d’égorger des moutons pour l’Aïd dans la baignoire de leur HLM. La génération suivante se fournit à l’hypermarché. «On» devrait s’en réjouir de cette intégration, y compris commerciale – eh bien non, «on» décide même d’y voir une provocation délibérée. A y bien réfléchir la vente de viande halal n’insulte pas plus le client chrétien que la promo sur le porc n’insulte le client musulman.

Exemple suivant: l’armée, la police - les jeunes Maghrébins y sont de plus en plus présents. «On» devrait s’en réjouir, «on» s’inquiétait d’une présence étrangère et ils saluent les couleurs, «on» leur reprochait volontiers d’être des délinquants mais voici qu’ils les arrêtent. Là encore curieusement: «on» déplore souvent ce dont «on» devrait se réjouir. Leurs pères étaient ouvriers, manœuvres, éventuellement épiciers. Ils sont (bravo) militaires, policiers mais aussi caissiers, enseignants, chauffeurs de taxis, médecins, travailleurs précaires, postiers. L’intégration est patente.

Autre fantasme: un Maghrébin serait forcément ‘musulman’ - dans le sens religieux du terme. C’est à peu près aussi abusif que de voir un chrétien dans n’importe quel Gaulois, du moment qu’il fête Noël en famille, que sa grand-mère allait à la messe, et que son prénom était celui d’un saint. Si l’on va par-là il y a certes 6 millions de ‘musulmans’ en France mais il y a aussi près de 60 millions de ‘chrétiens’. Chouette. Mais non: seul le dixième des Maghrébins de France se plient aux exigences de l’islam.

Il y a encore un autre fantasme, celui des pouvoirs publics qui pensent devoir aider la religion musulmane à s’acclimater ici (voyez «islam de France respectueux des valeurs républicaines» dans Google). Curieux mélange des genres quand un haut responsable de la République déclare que ‘le véritable islam’ n’impose pas ceci ou permet cela, l’interprétation des textes sacrés de l’islam est un art difficile auquel l’ENA prépare peu. Et d’abord: de quel droit les pouvoirs publics imposeraient-ils une interprétation religieuse (fut-elle la bonne) plutôt qu’une autre? Cette notion de religion ‘véritable’ ne colle pas bien avec un siècle de laïcisme républicain. A dire vrai, les musulmans doivent se méfier – on passe vite de «Je vais t’aider à prier en finançant ta mosquée» à «Je vais t’aider à prier: répète après moi…».

Je termine cette réflexion impromptue en disant que si «on» veut convertir des musulmans (avec ou sans guillemets), si «on» veut amener à la foi catholique ne serait-ce que quelques grosses poignées d’entre eux, il faudra les voir pour ce qu’ils sont: des gens normaux... et leur parler avec une certaine aménité. Mon expérience est qu'elle est rare dans notre milieu.

PS/ … et bonne fin de ramadan à mes amis musulmans, avec ou sans guillemets.

mardi 25 août 2009

(et pendant ce temps... - août 2009)

En avril j'écrivais qu'un événement peut en cacher un autre: Pendant que les tradinautes avaient le nez sur les derniers soubresauts de l'affaire Mgr Williamson et autres micropéripéties, les Franciscains de l’Immaculée faisaient de la forme extraordinaire du rite romain leur «forme privilégiée» - en toute discrétion.

En août, tandis que dans notre bocal tradi nous ergotons à l'infini sur la vente de viande hallal en hypermarché, je lis qu'à Elysburg (diocèse d'Harrisburg, en Pennsylvanie - USA) reviennent les Carmélites. Elles sont onze qui arrivent du Nebraska, leur couvent a du essaimer suite à un afflux de vocations. Onze sœurs arrivent donc, dont deux ont plus de trente ans.

Des journalistes locaux ont pu visiter le monastère, ils ont vu les matelas de paille, le crane posé sur la table du réfectoire (memento mori), ils ont pu parler à deux sœurs (derrière une grosse grille métallique). Que croyez vous qu'ils en pensent? "Passéisme", "manque d'ouverture"? Pas du tout. On n'est pas en France mais au Nebraska (12% de catholiques) alors ils écrivent que les sœurs sont "libérées des bruits et des distractions".

Mgr Rhoades (Veritatem in Caritate) est venu hier lundi bénir le monastère. La messe (forme extraordinaire du rite) est à 7 heures en semaine, à 8 heures le samedi et le dimanche matin, peut-être pour en rendre l'accès plus facile aux fidèles des environs. A cette heure là, il y a près de quatre heures que les sœurs sont debout.

mercredi 19 août 2009

Le 21 août prochain...

... entre 18 H et 21 H, j'animerai, à titre exceptionnel, sur Radio Courtoisie le Journal de Catherine Rouvier. Au programme : l'Iran, le travail du dimanche, l'année du prêtre et la condamnation de l'Action Française, à propos d'un Colloque à la mi septembre dont e vous reparlerai.

Programme hétéroclite ? Disons varié. L'idée ? Observer les dimensions spirituelles de l'actualité. Dans cette période où sévit la Pensée unique, la mondialisation économique et le train train de la gouvernance, il est frappant de constater que beaucoup des questions qui font la une de l'actualité ont une dimension spirituelle.

Prenons le premier sujet : l'Iran, prototype des "Etats voyous" dénoncés par George Bush, en quête de la Bombe atomique est un grand pays dont les racines sont plus profondes que le jeu politique d'aujourd'hui. Quelle est l'importance du chi'isme, de son légitimisme monarchique et de son culte des martyrs ? Il faut remonter bien en deçà de l'islam pour comprendre ce qui se passe. L'Iran est étymologiquement le pays des Ariens, le Shah portait le titre de "lumière des ariens", c'est le premier des Pahlavi qui a choisi ce nom pour son pays en 1933. Disons encore qu'en Iran, on parle persan et pas arabe et que les Iraniens se disent couramment "fils de Cyrus". Ca ne nous rajeunit pas ! Mais il faut comprendre ce patrimoine spirituel de l'Iran pour comprendre avec quelle exaltation beaucoup d'Iraniens conçoivent le face à face entre leur pays et les États unis...

La Guerre contre l'Iran, participe-t-elle de ses fameux "clash de civilisations" identifiés par Samuel Hunttington ? Faut-il y voir l'effet du fanatisme islamiste en guerre contre l'Occident ? Ne s'agit-il pas plutôt d'un conflit identitaire, dont les racines se trouvent à l'intérieur même du pays ?

L'Iran d'aujourd'hui est un pays qui court derrière son mythe fondateur - comme l'Allemagne, chien fou de l'Europe, l'a fait durant tout le XIXème siècle. Le gouvernement des Mollah pourrait bien être une sorte de paravent derrière lequel fermente une révolution qui est aussi bien une révolution des mœurs (le fait est peu connu mais bien réel : le mariage est en crise en Iran bien plus sous les Mollah que sous le Shah) qu'une révolution religieuse, dont on ne sait pas où elle peut nous mener. Cette crise identitaire n'épargne pas la religion musulmane et l'Iran est certainement l'un des pays officiellement musulman où l'islam se trouve remis en cause par la plus grande quantité d'individus... Le pamphlet Bas les voiles signé l'an dernier par une Iranienne Chadortt Djavann est particulièrement significatif de cette évolution des élites sociales perses... même si la farouche déclaration d'agnosticisme qu'il contient reste très personnelle à son auteur.

Avec Houchang Nahavandi, ancien recteur de l'université de Téhéran, nous nous essaierons à un décryptage de la crise iranienne au-delà des idées reçues. C'est sur Radio Courtoisie, et c'est vendredi prochain à partir de 18 H. Toutes vos questions seront les bienvenues.

dimanche 16 août 2009

Procession du 15 août

J'en ai vu et j'en ai animé des processions dans ma vie, en 20 ans de sacerdoce. Je dois dire que celles qu'organise monseigneur Jacquin à Notre Dame de Paris à l'occasion du 15 août sont magnifiques.
Le pluriel du pronom celles n'est pas fortuit. Il y a deux processions le 15 août à Notre Dame. La première est fluviale, je ne l'ai pas faite. Elle a lieu le 14. Cette année, 13 bateaux pour chanter les louanges de Notre Dame : laudate Mariam.

Ce vieux cantique était chanté à pleine voix aujourd'hui par 20 000 Parisiens, qui encombraient tout l'espace des grandes artères proches de Notre Dame. Une chrétienté en marche, pas une chrétienté idéologique ou nostalgique, pas une chrétienté qui aurait rêvé à des lendemains qui chantent ou qui auraient sacrifié à la déploration d'un passé révolu, mais des gens simples dans l'aujourd'hui d'un acte collectif, qui étaient là non seulement pour prier mais pour montrer la réalité de leur foi et pour se retremper personnellement dans cette réalité. Des gens simples qui communiquaient cette simplicité à travers leur participation active. Même atmosphère qu'aux Invalides avec Benoît XVI l'an dernier. Et, pour cette occasion de plein été dans un Paris désert, beaucoup de personnes d'origine antillaise ou africaine, chantant à plein coeur Marie, "le sourire de Dieu", comme l'exprime très bien l'un des cantiques longuement repris.

Décidément la Tradition... ça marche... dans tous les sens du terme. Dix dizaines de chapelet ont été récitées dans un long périple autour de Notre Dame. Pendant ce temps la cathédrale (dont les orgues et les choeurs étaient somptueusement retransmis pendant toute la procession par une sonorisation vraiment à la hauteur de l'événement) est restée porte close. Il fallait vraiment que Marie (quelle statue admirable), au retour des processionnants soit "la première à rentrer dans sa cathédrale" selon la belle formule du Recteur. Bilan : 20 000 personnes d'après l'AFP. Beaucoup plus si l'on compte les touristes et les riverains emportés un instant dans ce moment de grâce.

Quand on y réfléchit c'est cela le 15 août : la fête de la dévotion mariale. Le premier dévot à Marie, c'est Dieu qui s'incline devant sa servante en la faisant monter au Ciel avec son corps, ne tolérant pas que la mère du Messie connaisse la corruption du tombeau.

La jeune fille, enceinte du Saint Esprit n'avait-elle pas une lucidité prodigieuse sur la grandeur vraiment surnaturelle de son destin, lorsqu'elle chante dans son Magnificat : "Toutes les générations me diront bienheureuses..." ?

2 000 ans après, les Parisiens s'y sont mis à 20 000 pour lui donner raison encore et encore.

vendredi 14 août 2009

Shoah...

Je découvre en ce moment l'oeuvre magnifique et écrasante d'Imre Kertesz. Littéralement, il voit la shoah partout. Voici comment il l'explique à ces lecteurs. Vous vous souviendrez que shoah signifie catastrophe...
« Nous vivons à l’ère de la Catastrophe, chaque homme est un porteur de la catastrophe, c’est pourquoi il faut un art de vivre particulier si l’on veut survivre. L’homme de la catastrophe n’a pas de destin, pas de qualités, pas de caractère. Son environnement social effroyable – l’Etat, la dictature, appelle cela comme tu veux – l’attire avec la force d’un tourbillon vertigineux jusqu’à ce qu’il cesse de résister et que le chaos jaillisse en lui comme un geyser brûlant – et que le chaos devienne son élément naturel. Pour lui, il n’y a plus de retour possible vers un centre du Moi, vers une certitude inébranlable et indéniable du Moi. Il est au sens propre du terme, perdu. L’être sans le Moi c’est la Catastrophe, le mal véritable où l’homme sans être mauvais lui-même est capable de tous les méfaits ».
Le livre est intitulé Liquidation. Vous trouvez ce texte p. 59 de l'éd. Babel.
Je suis convaincu qu'il y a grâce à ce que Kertesz appelle le génie éthique des Juifs et grâce à ce que nous pouvons nommer, avec saint Paul, le don de Dieu sans repentance, une anthropologie (encore balbutiante) de la Shoah qui devrait réapprendre l'enfer aux incurables optimistes et aux fieffés menteurs (sur nous mêmes) que nous voulons à toutes forces rester...
Affaire... à suivre !

lundi 10 août 2009

Le metablog est-il en vacances ?

... me demande-t-on. En réalité, poster c'est des vacances pour moi. Rien de plus agréable que d'écrire familièrement sur tous sujets, selon l'inspiration du moment, à des amis dont je sais qu'ils me liront avec bienveillance.

En réalité, durant les vacances, les cérémonies se multiplient, les kilomètres s'accumulent et je n'ai guère le temps de flâner sur ce Blog. Mais je vais rattraper le temps perdu. Promis.

Il me semble que ces excuses plates que je vous fait, chers amis, permettent une petite considération sur les vacances.

En français, le mot "vacances" renvoie à l'idée d'interruption. On n'est pas loin du "vide" : vacuum. Il est vrai qu'il n'est pas mauvais parfois de faire le vide deux ou trois jours. Mais ces vacances à Marrakech, dans un hôtel cinq étoiles où l'on fait le vide pendant dix jours, sans même se donner la peine de sortir en ville, cela a quelque chose de... vide. de déprimant.

Les Anglais sont beaucoup plus édifiants, puisque pour eux les vacances correspondent toujours à des jours saints : holly-days.

Mais n'y a-t-il pas un peu d'affectation dans cette référence anglaise à la sainteté du calendrier ? Les vacances ne sont pas faites pour... faire une retraite spirituelle ou pour des exercices de sanctification particulièrement musclés, même s'il est très beau d'en profiter pour cela. Tout ce qui est excessif est insignifiant.

Alors revenons au français et au latin du Dictionnaire étymologique d'Ernout et Meillet, bien connu des forts en thème.

Vacances renvoie, à travers ce qui est vacant au vide. Mais il y a plusieurs manières de concevoir ce vide. On peut l'envisager comme le "rien" : morne plaine ou morne plage, qu'importe.

Mais on peut aussi considérer - et la langue française nous y pousse : le génie d'une langue ce n'est pas rien - que ce vide est positif parce qu'il correspond avant tout à une disponibilité. On fait le vide non pas pour faire le vide : ça ce n'est pas chrétien, c'est bouddhique, c'est le nouveau bouddhisme occidental plutôt, que stigmatisait Nietzsche avec tellement de raison. En réalité, on fait le vide pour se rendre disponible à tout ce à quoi on ne pense pas assez, à tout ce que l'on n'a pas le temps de faire ordinairement.

La langue française nous pousse à cette interprétation active des vacances, à travers le verbe "vaquer". Vaquer, cela signifie s'occuper de... avoir du temps pour... S'être rendu disponible pour... Quelle belle définition des vacances : elles nous permettent de vaquer à ce qui nous passionne, alors que tout le long de l'année, nous nous devons à ce qui nous nourrit.

Les vacances ? Ce n'est pas le moment où l'on ne fait rien; ce devrait être le moment où l'on fait ce que l'on aime vraiment faire. Le génie du français nous le souffle à l'oreille : les vacances, c'est fait pour vaquer...