jeudi 19 mars 2009

Errare humanum, perseverare diabolicum.

Ce que j'ai dit de l'archevêque de Recife me paraît avoir été conditionné par un raccourci dramatique des événements, véhiculé par la presse et les médias. Mon ami Daniel Hamiche, journaliste efficace et plus scrupuleux que je ne le suis parfois, me met sous les yeux un certain nombre de données que je souhaite vous exposer. Dans la presse, on mûrit un papier, qui doit représenter une véritable synthèse. Sur Internet, en revanche, le temps se mesure autrement. On écrit dans l’instant, étant entendu que dans l’instant on peut préciser ou corriger. Je tiens beaucoup à la dimension instantanée de ce Blog (où se trouvent conservées – horresco referens - même certaines fautes d’orthographe) et où une véritable interactivité entre les auteurs et les lecteurs est la garantie de vérité que la presse écrite ne propose pas encore. Vos commentaires sont importants, dans la culture Internet, parce que manifestant les critiques, les précisions à apporter ou simplement des positions différentes, ils instaurent un véritable débat en temps réel. Il me semble que dans l’Eglise catholique actuelle, c’est cette culture du débat qui manque le plus.

Voici donc des précisions. D’autres viendront certainement, et peut-être viendront-elles de vous qui lisez ce texte. En l'espèce, parmi ces données d’abord, l'entretien que donne le Père Edson Rodrigues, curé en titre de la petite "Carmen", 9 ans à Samuel Pruvot, dans Famille Chrétienne du 21 mars. Ce texte à paraître offre une présentation honnête du problème, qui montre qu'il y a eu un engagement à la fois médical, social et humain de toute une paroisse (il ne s'agit pas de Recife mais de la paroisse d'Alagoinha), que le Conseil de l’Institut médical de l’enfance, dans la ville d'Alagoinha, à l'unanimité de ses 5 membres réunis en catastrophe le 28 février, s'est prononcé contre l'avortement et que c'est une femme de coeur, Marie José Gomes, qui a tout fait pour sauver les deux petits jumeaux.

L'image d'un évêque lointain qui fulmine une excommunication dans une affaire qu'il connaît mal, sans souci des personne, avec un Code de droit Canon à la place du coeur ne correspond pas non plus à la réalité. Mgr Mindanho, évêque de Recife, successeur de Dom Helder Camara et membre de l’Opus Dei, a pris l’affaire très au sérieux. Le 3 mars dernier, il convoquait un groupe de médecins, avec à leur tête le directeur de l’Institut médical de l’enfance, Antonio Figueras. C’est à la suite de cette réunion, avant que n’ait lieu l’avortement redouté, dans un hôpital de Recife où la fillette avait été transportée, que l’évêque du diocèse rend son verdict de juge pour son diocèse : cet avortement s’il avait lieu serait passible de l’excommunication ipso facto (latae sententiae). Il n’a donc pas fulminé l’excommunication après l’événement comme je l’ai écrit. Il a simplement rappelé le droit, après avoir pris le conseil des médecins.

C’était le 3 mars. Le 4 avait lieu l’avortement, non pas à Alagoinha mais à Recife, où l’enfant enceinte avait été transportée, à l’initiative de la sage femme Karolina Rodriguès, qui, soutenue par l’organisation féministe Curumin, avait réussi à convaincre le père et la mère de l’enfant, tous deux hostiles à l’avortement au départ. C’est le Père, séparé de sa femme, chez qui règne un beau père violeur de 23 ans, qui a porté l’affaire à la paroisse. Il est foncièrement hostile à l’avortement. La mère est totalement inculte. On lui fait « signer » un certain nombre de papiers de décharge avec son empreinte digitale. Pourtant elle répète qu’ « elle ne veut pas que sa fille avorte ».

A l’un et à l’autre, on fait peur. Le médecin de Recife, qui va pratiquer l’avortement, le docteur Sergio Cabral, déclare que « les organes de cette petite ne sont pas encore formés ». et qu’on ne peut donc pas lui faire courir le risque d’un accouchement par césarienne… Remarquons simplement qu’il ne connaît pas l’enfant (qui vit à 200 KM de Recife) et que le 28 février précédent, quatre jours avant donc, le Conseil de l’Institut médical de l’enfance à Alagoinha était d’un tout autre avis… Il faut noter au Guiness de bien tristes records qu’une dizaine ou une quinzaine de cas de ce genre sont connus. Ce sont souvent des Indiennes. Elles ont moins de 10 ans (rien à voir avec les filles de moins de… 14 ans que m’objecte l’une d’entre vous)…

Que dire après enquête ?

Les considérations générales que j’ai développées demeure valables dans leur généralité. C’est pourquoi du reste je maintiens ce post, qui me paraît même important. Mais la figure de l’évêque de Recife et du curé d’Alagoinha ne sont pas du tout ce que les diffamateurs de la grosse presse ont voulu qu’ils soient : excommunicateurs sans cœur etc. En suivant très attentivement le cas de la petite « Carmen », ils sont tombés dans le piège qui leur était tendu. Ont-il manqué de prudence ? A 6000 km, c’est bien difficile de trancher. Mais au moins n’ont-ils manqué ni de zèle ni d’attention pastorale. Je ne vois pas certains des évêques français qui les critiquent, en invoquant seulement le choc compassionnel, s’investir avec autant d’abnégation. Le curé d’Alagoinha a fait des centaines de km pour suivre la petite jusqu’à Recife et l’évêque a diligenté une véritable enquête. Dont acte. Mais les arguments canoniques soulevés par Mgr di Falco et dont je fais état de mon côté en m’appuyant sur l’article 1324 §2 n. 3, 5 8 et 9 du code (voir le post : Suis-je à ma place ?) demeurent solides, ainsi que l’impératif prudentiel, plus que jamais de saison, alors que se déclenche une campagne systématique contre le pape et la tradition de l’Eglise, campagne internationale, engagée depuis l’affaire Williamson, et qui a rebondi avec l’affaire du préservatif, heureusement ramenée à sa véritable dimension par notre Webmestre (voir post précédent).

Je crois vraiment que les ennemis de l’Eglise en font trop. Les véritables catholiques doivent sans tergiverser (mais non sans réfléchir) prendre acte de cette campagne et défendre le pape, que les médias veulent faire passer pour seul contre tous et diabolisé, alors qu’aujourd’hui Benoît XVI déchaîne les foules en Afrique et que les évêques africains rappellent à leurs confrères européens l’importance de la morale naturelle, face à l’hédonisme, maladie typique des pays développés.

3 commentaires:

  1. Voilà !

    Bravo M.l'abbé pour cette rectification.

    Bien à vous.
    Emmanuel

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  2. Bravo aussi à M.l'Abbé d'avoir tout de même maintenu sa position sur l'impossibilité de la petite Carmen de porter ces foetus, étant donné les circonstances : son âge, son immaturité psychologique, l'immaturité physiologique, le choc post-viol, le risque d'un traumatisme à vie mettant en danger son évolution future, voire ses jours.
    Etre pro-vie c'est pro TOUTE VIE et pas uniquement la vie in utero.

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  3. Je suis bien de votre avis, seulement, on ne voit pas beaucoup de démentis dans la presse, après toute cette campagne étourdissante pour ne pas dire "estourbissante", campagne de mensonges, de désinformations, de haine et de boue. Je me demandais quand est-ce qu'ils en auront assez ? Il semble bien que les limites n'aient pas encore été trouvées....

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